Pousse-Bouton chope un carton rouge

Tout le monde veut faire la Une une fois dans sa vie, ou alors tu ouvres ton sac pour faire bien auprès des copains et montrer que t'es dans le secret des chefs. On a déjà eu Bébé, le maître d'hôtel à Lilly, qu'avait mis de côté ce qui se disait dans le bureau fermé de sa patronne, y a aussi Clara qu'a balancé des histoires d'enveloppes et de valises de biftons qu'elle allait chercher quelques jours avant que des chefs de bandes viennent taper le carton chez la vioque. Ce coup-ci c'est des papiers de chez le notaire qui pointent leur nez.

Bin ouais, c'est pas toujours propre chez les notaires parce qu'y en a qu'ont des papiers qui traînent et faut pas que les autre sachent ce qui a écrit dessus. C'est plus du tout drôle le lendemain qu'on t'as foutu en caisse sous le gazon. Y'a plus de surprise.

C'est plus du genre : — Madame, Monsieur vous avez été conviés ce jour pour régler la succession de feu Madame Lilly...

On aura plutôt : — Madame, vous avez été conviés ce jour pour... — La ferme le rond de cuir ! Passe-moi les clefs de l'appart, le chéquier et les meubles ! J'ai pas que ça à foutre. Et puis c'est où que j'signe ? Alors tu te magnes ou j'appelle les flics. — S'il vous plaît, je dois vous lire ses dernières volontés, c'est la loi. — On s'en cogne de tes histoires, ton discours tu te le carres où j'pense puisqu'on l'a déjà lu dans le journal d'hier. Alors il est où ton papier que je griffonne dessus et que je me casse.

Je sais pas si vous avez vu mais le notaire y dit plus « Madame, Monsieur », y dit « Madame ». C'est tout. Y'en a plus de Monsieur. La gamine elle est toute seule dans la course et sûre de récupérer le gros lot. Ça change un peu la donne, non ? Ouaip ! Z'avez compris. Francis a été sorti du terrain. Et pas par n'importe qui, pas par un juge où un thérapeute. Non ! Par l'arbitre en chef, Bas-de-Laine elle-même. La Lilly elle a viré Francis de l'équipe pour l'après-match parce qu'y jouait un peu trop perso.

Vous savez ce qui nous attend maintenant ? C'est que Francis attaque Francine parce qu'elle aurait profité de la faiblesse de la tête à Lilly pour que la daronne le raye sur le papier. C'est pas dit qu'y fasse ça, mais y jouent un peu avec leurs règles la bande à Betenlong et on est pas prêt de connaître la fin.

Règlement de compte chez les bouchers

Vous vous rappelez, Francine elle a demandé à un toubib de vérifier si sa daronne était pas gâteuse ? Et y en a un autre qu'a dit que tout roule dans la cabasse à Lilly. Bin ça a fait du bruit chez les blouses blanches. Pour une fois ça va pas être les globules du client qui vont gicler, ça sera les leurs.

Quand les avocats sont pas d'accord, c'est pour ça qu'y sont là, y vont gonfler leurs meutes de toubibs. Celui qui bosse pour la gamine, il a dit que la vioque elle avait les neurones qui commençaient à manquer & que plus y en a en moins, moins elle sait ce qu'elle file en plus à Pousse Bouton. Comme les robes noires se tirent dessus à boulets rouges, les blouses blanches font pareil. Imagine une baston entre des gars que tu payes pour te soigner & y en a un qui dit que t'es malade & l'autre que tout roule. Tu les prends ou tu les prends pas tes médocs ? C'est pareil pour Bas-de-Laine sauf que c'est pas elle qu'a demandé à savoir si elle est patraque, c'est sa petite. C'est un peu le contraire de d'habitude quand ce sont les vioques qui font soigner leurs petits, mais quand on est pété de tunes on change souvent les règles, histoire de s'amuser un peu.

Maintenant faut savoir que les blouses blanches y z'ont leurs juges à eux. C'est là que ça devient drôle & que les pros d'Auteuil c'est des p'tits bras par rapport à l'équipe qu'on a maintenant. On se retrouve au départ du grand prix de boulevard Haussmann avec une sacré écurie de robes noires, toques blanches. Le grand-prix d'Hippocrate est lancé pour savoir lequel est le meilleur, & comme toujours, celui qui fait pas bonne allure y sort du terrain. Là, on a un petit soucis sur ce genre de steeple, c'est qu'y a pas trop de bosses ou de rivières à passer. Si tu veux savoir si ton gars doit aller en tôle à la Salepétrière tu peux toujours lui en prendre un bout, regarder à la loupe, mettre des gouttes dessus pour voir quelle couleur ça prend ou filer ça à un rat blanc & attendre de savoir s'y claque ou s'il a toujours la pêche. Avec ce genre de choses t'as une bonne idée de combien d'années y va prendre. Ici t'as pas ça, tu causes avec lui & tu comptes les conneries qu'y dit. S'y en a quelques-unes il est normal, s'y en a trop y l'est pas bien, si y'en a pas c'est grave mais tu fermes ta gueule parce qu'y saura prouver que tu te goures. T'y connais rien.

Comme la Lilly elle est passée dans le poste sans faire de boulettes, ça va pas être facile de juger l'arrivée & comme y peuvent pas départager sur photo tout le monde va récupérer sa mise. Ça aura fait du bruit. L'arbitre qui doit dire si Francine a eu raison de sortir les flingues est pas plus avancé & y va dire « zéro partout, balle au centre ». Y'a plus qu'à attendre le coup sifflet final.

Francis dans le viseur

Ça a pas manqué, quand y a du fric à la une ça attise les engueulades & là, la brique que Francis ramasse tous les ans avec l'Auréole, ça réveille certains. Faut dire que les gars qui sont payés pour être sûrs que leurs potes touchent ce qu'on leur doit, un bijou comme ça ils vont pas le laisser passer. Sa boîte touche quatre cents kilos tous les ans. Et alors ? Elle est en faillite sa turne.

Revenons-en aux gus qui encaissent pour que les autres en fassent autant. Y sont des pros de la discussion à battons rompus, surtout quand y descendent dans la rue. Leur grand truc, ces dernier temps, c'est plus que les copains gagnent plus en trimant autant qu'avant, c'est qu'y touchent autant en en foutant moins. Comme tout va pas bien dans le taff y se sont dits que plutôt que d'essayer de récupérer plus d'oseille, ce que les boîtes savent plus faire, on va faire le contraire. Puisque j'arrive plus à avoir plus pour autant de boulot, bin je vais m'arranger pour que tu bosses moins pour pareil. En fait t'encaisses autant mais je t'ai fait gagné des jours de vacances. Comme t'as autant de biftons dans le larfeuille & que t'as beaucoup plus de temps pour le claquer, t'es dans la mouise.

Au lieu de passer une heure le soir au troquet avec les potes, t'y es maintenant deux heures, & le patron, avant qu'y baisse le rideau, y te demande la même note ? Bin non, t'es resté deux fois plus de temps alors t'as picolé deux fois plus, donc t'as claqué deux fois plus. Ta fin de mois tu commences à l'appeler fin de semaine & c'est beaucoup moins drôle.

Alors les défenseurs du pauvre travailleur y se sont mis à attaquer l'Auréole en disant des trucs, mais alors... si les cons se taisaient les journaux feraient faillites. Le record de France a été battu d'une large tête par Caryon le délégué chef chez l'Auréole. Je dis large pour sa tête parce que vous allez voir que côté profondeur c'est pas ça, si on la remplissait de flotte, je suis sûr qu'on pourrait pas y noyer une souris. Le Caryon y dit « puisque Francis est de fait un salarié de l'Auréole, l'affaire devient une affaire l'Auréole », bin oui, pour lui si tu bosses pour Machin tu bosses chez Machin. Si seulement c'était vrai. Tiens, avec tout ce que je bosse pour les impôts, je devrais être un fonctionnaire, non ?

Ce qui est chouette avec Lilly & ses potes c'est que plus ça va plus on a de monde embarqué dans l'histoire & franchement on commence à avoir n'importe qui. Mais c'est pas fini & demain, un nouvel épisode de la saga Lilly va certainement se ramener avec de nouveaux acteurs.

Francis et les bons comptes

Je viens de faire un tour dans mes poubelles et, en me promenant dans les papiers, j'ai retrouvé des trucs que j'avais ratés. Des gars de l'Auréole ont mis la main sur Pousse-Bouton & le cash qu'il encaissait régulièrement. Faut reconnaître que le Francis est un gars de la haute qui cause qu'avec les grands, & quand on est grand & de la haute, on est cher. C'est pas pour rien qu'on l'appelle « mon très cher maître ».

Tiens ! Y a quelques quinze ans maintenant il a même fait une exposition à la fondation Chartier. Vous savez, ceux qui vendent des cailloux à des prix défiant toute concurrence ; qu'y disent. C'est normal parce qu'y a pas un concurrent qui réussira à te fourguer du gravier contre un tel wagon de biftons. Eux, si ! Les prix qu'y mettent ces gars là c'est tellement de zéros après le 1 que tu lirais ça dans un polar, tu penserais que l'auteur roule pas ses tiges avec des feuilles de la SEITA & qu'y devrait retourner sur les bancs pour réapprendre à compter. Imagine, leurs machins coûtent tellement que si tu vends ta baraque, ta caisse & que tu mets madame sur le trottoir, t'auras toujours pas assez pour lui acheter une bagouse à ta Simone. En plus, leurs caillasses sont tellement grosses que tu fais sapin de Noël si t'as les moyens de raquer pour une totale oreilles-cou-doigts. Et pas besoin de mettre des piles dedans, c'est tellement brillant que ça clignote tout seul. Y'a qu'à Las Vegas qu'on trouve mieux.

En tout cas, le Francis il a signé des contrats avec l'Auréole pour les aider dans tout ce qui touche à l'effet que ça fait leurs trucs. Il est là pour leur dire si les couleurs sont biens pour le prochain hiver, qu'ils devraient changer de gonzesse sur leur propagande & en choisir une plus maigre ou plus grande ou plus rousse. Bref, on le paye parce que c'est un artiste & un artiste ça a toujours des idées. Quoique pas tous, en tout cas y'en a qu'ont pas plus de neurones que mon ongle & qui se disent artistes.

Donc le Francis il a une boîte, Hérézy, qui fait devinez quoi ? De la photographie, en tout cas c'est ce qu'y z'ont dit quand y z'ont commencé. Je suis allé faire un tour pour voir leurs comptes... Bin mon vieux, ça va mal chez Francis, sa boîte a tellement perdu d'argent ces dernières années que je sais pas comment y fait pour payer ses larbins. Mais y'a pas à dire, quand t'es de la haute, les banques elles te laissent peinard. Je me demande combien de temps y vont le laisser tranquille avec les briques que sa boîte a perdue, d'ailleurs je me demande si un juge va pas aussi mettre son nez là-dedans parce que ça sent pas bon du tout & ils aiment ça les gars en robe noire. Plus ça pue, plus tu en auras. Y sont un peu comme les vautours, plus ça sent la charogne plus y se lèchent les babines.

Pousse-Bouton a donc sa turne qui joue au parachute en ayant oublié la toile, mais c'est pas tout. Il encaisse aussi en direct de l'Auréole. Comme ça si le banquier vient lui demander que Hérézy rembourse la brique & demi qu'elle lui doit, y ferme la boutique & y continue d'encaisser en direct. Avoir un contrat avec sa boîte c'est bien, mais en avoir un direct in ze pocket c'est pas nul non plus. Il est bon en addition le gars Francis, y a pas à dire.

Riri remet le couvert

On était tranquille, le mois d'août commençais à sentir la mer & v'là t'y pas que le papier se remet à faire du bruit autour de Flouze Brother. Faut dire que le ministre il est pas vraiment à l'aise avec toutes les boutiques où il a bossé. On l'a déjà aligné avec la famille L'Auréole & là c'est la même chose avec un artiste tôlier de la haute. Quasi même motif, même punition. La différence est que cette fois-ci c'est pas renvoyer du blé à celui à qui on en a trop piqué, c'est s'arranger pour que sa marmaille en paye pas trop dès le départ. C'est plus « j'te pique, j'te rends » c'est « j'te pique pas ». On couvre tous les cas de figure sauf « j'te pique, point barre », mais ça c'est pour Marcel Dupont & tout les autres.

Honnêtement, c'est vrai que pour le péquenaud moyen ça fout les boules de savoir que, si t'es un bourge de compétition & un vrai, un qu'encaisse le RMI de tout l'immeuble en quelques heures, alors les pantoufles de Bercy vont te filer de l'avoine au lieu de pomper sur ta récolte. C'est toujours comme ça avec la façon qu'on a de raconter les histoires. On gonfle tout pour faire rire, pleurer ou trembler ; kif-kif avec le téléphone arabe, tu files un tuyau à un pote & tu retrouves le contraire dans le canard du matin, parce que ça lui fait des jolis plumes.

Exemple : suite au décès d'un ferrailleur y a un paquet de tôles en héritage & ceux à qui on va les fourguer doivent en filer un bout. On fait un premier compte & on trouve 1 200 tonnes de tôles. Ça fait lourd, très lourd & les gamins doivent payer un paquet, une douloureuse de cent patates. Y'en a qui râlent parce qu'y en a un peu beaucoup trop & qu'ce serait sympa de recompter histoire que tout le monde soit d'accord avec le partage. Un juge est mis sur le coup & y suit le mouvement. On recompte & y'en a moins cette fois-ci, genre des restes de bagnoles qui avait cartonné grave & qui ne valent pas grand chose. Ça fait trois cents tonnes en moins. On a donc 27 patates de moins à filer à Riri & sa fiscal team.

Résumons pour le voisin d'en face qui comprend pas trop : Y'avait trois cents bouts de tôle en trop & au prix où qu'ça coûte ça fait 27 briques à oublier. Riri était d'accord avec les gars en robes noires & de toute façon il est pas de corvée sur ce genre de chose.

Les papiers comprime l'histoire en ne gardant que c'qui fait le plus du bruit : Riri fait cadeau de 27 bâtons à un groupe de pétés de tunes.

Voilà, z'avez compris. Y'a différentes façons de lâcher le morceau. Des fois on l'ouvre & on dit pas tout parce que les autres savent de quoi on cause, d'autres fois on raconte pas tout pour pas avoir de problèmes au cas où il y ait un képi dans la salle, ou, enfin, on dit pas tout pour garder des trucs pour plus tard. Maintenant, entre nous, si les marchands de boniments disaient ce qu'on sait déjà on irait pas raquer pour leur prose. C'est quand même bien quand y disent pas tout, histoire d'avoir des épisodes sous le coude. Mais c'est pas parce qu'on dit pas tout qu'on dit n'importe quoi, hein !